Une autre histoire de l'humanité
3. L'évolution de La vie
et les champs d'information
Partie 3
Un principe organisateur
Pratiques inquiétantes dans la science
Alain Boudet
Dr en Sciences Physiques
Résumé: 3. Certains scientifiques et philosophes osent exprimer leur conviction de l'existence d'un principe organisateur supérieur qui guiderait les créations des organismes vivants. Le prix à payer est de faire la séparation dans leur esprit entre un domaine subjectif qui relève de leur foi et un domaine scientifique occupé par la théorie de l'évolution. Les chercheurs qui avancent des modèles scientifiques différents sont censurés, ridiculisés, ou évincés des institutions, bien loin d'un dialogue honnête qu'on pourrait attendre de la part de scientifiques éduqués. Alors qu'elle affirme abusivement être un fait objectif, la théorie synthétique de l'évolution est en réalité une hypothèse fondée sur des présupposés métaphysiques.
Dans la partie précédente, j'ai décrit une alternative récente à la théorie évolutive de Darwin: la théorie synthétique évolutive étendue, pour laquelle le moteur de l'évolution est une force interne à l'organisme. Cette force prendrait naissance dans la complexité des interactions biochimiques, construisant un système organisé décrit mathématiquement par la théorie des systèmes.
L'idée que l'évolution soit orientée dans une direction déterminée par une force interne a été proposée comme alternative dès l'époque de Darwin (voir en annexe L'évolution orientée).
Mais tout ce qui évoque, même de loin, une cause finale, un but, est rejeté sarcastiquement, âprement, voire violemment, par la communauté scientifique, même lorsqu'il ne s'agit que d'introduire un principe d'auto-organisation. Nous en verrons des exemples dans cette partie.
Pourtant, l'introduction de ce moteur interne dans la théorie reste une hypothèse très modeste. Certes elle ouvre des pistes fructueuses pour décrire le comment de l'évolution, mais elle n'aborde pas le pourquoi, autrement dit la nature des forces qui ont présidé à l'élaboration de ces structures biochimiques.
Or pour une autre catégorie de chercheurs, il semble d'une grande évidence que ces forces sont issues d'un principe organisateur supérieur qui intervient dans la conception des organismes.
Mise en garde !
Dès que l'on émet l'hypothèse de l'existence d'un principe organisateur, d'une Intelligence supérieure tenant lieu d'architecte, alors les esprits s'excitent, assimilant cette notion à des principes religieux qu'ils rejettent. Ils ne tentent même pas d'écouter leur interlocuteur et de comprendre le sens bien plus large que peut prendre le terme Intelligence supérieure.
Car poser l'hypothèse d'un principe organisateur ne consiste pas à asséner sèchement qu'un Dieu a tout créé avec ses outils. Il s'agit de reconnaitre, par l'observation et l'expérience, l'existence de sources supérieures d'information, et d'en explorer les mécanismes possibles.
Car, en préalable à toute représentation théorique de la réalité, il est incontestable que des plans de réalité supérieurs existent et qu'il faut en tenir compte. Ce n'est pas une superstition, une vérité révélée ou une croyance, mais une expérience transcendante vécue par de nombreuses personnes lors d'expansion de leur conscience. Les témoignages sont abondants. (voir mon article Au-delà de la matière: Les plans subtils d'intelligence supérieure. Une réalité tangible et incontournable)
Étant donné l'existence de ces plans, il reste à comprendre de quelle façon ou par quel processus ils interviennent dans la création d'organismes organisés. On peut distinguer deux niveaux de représentation possibles de cette intervention.
1. Au premier niveau, on constate par l'observation qu'un plan précis est manifesté dans les créatures biologiques. Elles sont le résultat d'un guide de construction élaboré avec intelligence.
Certains chercheurs sont très admiratifs de la beauté du monde miraculeux dans lequel nous vivons. Ils osent l'avouer courageusement et nous les en remercions. Nous allons rencontrer quelques-uns d'entre eux un peu plus loin dans cette partie.
Par contre, par honnêteté intellectuelle ou par prudence, ils ne s'aventurent pas plus loin et en restent à cette reconnaissance d'un plan supérieur. D'autres abordent un deuxième niveau.
2. Au deuxième niveau, nous cherchons à préciser quelques caractéristiques de la conscience intelligente qui a conçu ce plan et comment elle opère.
On pourrait évoquer une divinité, mais ce niveau est probablement hors de portée de notre investigation mentale et ne peut pas nous aider dans notre compréhension.
Par contre, il est à notre portée d'explorer des niveaux intermédiaires entre la divinité et nous, dont chacun peut faire l'expérience (partie 4). Nous découvrirons qu'il existe des programmes et des codes qui régissent les créations. Nous en avons parlé dans le premier chapitre, L'apparition de la Vie.
Restons au premier niveau. Les partisans de l'existence d'un principe organisateur sont motivés par plusieurs arguments.
Certains restent insatisfaits par la théorie néo-darwiniste, parce qu'elle comporte des lacunes et des mystères qui échappent à ses propres principes. Ces chercheurs acceptent la possibilité d'une évolution, mais ils refusent d'admettre que les mécanismes en soient les mutations aléatoires et la sélection naturelle.
Beaucoup sont perplexes ou époustouflés par la beauté et la perfection des créatures. Ils en concluent qu'une intelligence est à l'œuvre derrière ces créations.
Curieusement, c'est aussi ce qui a été enseigné par des visionnaires mystiques depuis des temps immémoriaux, pris de vertige dans la contemplation de la nature, et recevant parfois en rêve ou en méditation des visions des mondes et de leurs rouages.
D'autres personnes ont eu des expériences mystiques directes, intenses, concernant la vie, les hommes et l'évolution de la conscience de l'humanité. Pour eux, le divin est une réalité vécue incontestable qui résonne et agit en eux. Elle n'a rien d'une croyance. Il est notable que ces personnes ne sont jamais mentionnées par les néodarwinistes, bien qu'elles soient nombreuses.
Il y a quelques dizaines d'années, les avancées de la connaissance en physique et surtout en astrophysique ont renforcé cet émerveillement vis-à-vis de la Nature pour certains chercheurs et philosophes. Elles ont démontré que la vie sur notre planète ne pouvait avoir lieu que parce que les lois de la physique avaient été réglées finement pour établir les conditions favorables au fonctionnement chimique et biologique de la vie.
C'est ce qu'on a nommé le principe cosmologique anthropique. Selon ce principe, l’univers se trouve avoir très exactement les propriétés nécessaires pour voir apparaitre un être doué de conscience et d’intelligence, l’être humain.
Attention de ne pas confondre ce mot anthropique avec l'entropie qui désigne la décroissance de l'ordre dans un système isolé (voir mon article L'éther des champs de torsion). Le mot anthropique est dérivé du mot grec anthrôpos qui signifie l'homme, comme dans anthropologie.
En effet, les lois de la physique sont régies par une quinzaine de constantes fondamentales (constante de gravité, vitesse de la lumière dans le vide, constante de Planck, charge électrique du proton, ...). L'astrophysicien anglais John Barrow (né en 1952) et le physicien états-unien Frank Tipler (né en 1947) expliquent (The Anthropic Cosmological Principle, Oxford University Press, 1988) que les valeurs de ces constantes sont ajustées de telle façon qu'elles permettent la stabilité des structures de la matière, et l'existence d'un environnement favorable à la naissance et au développement des cellules vivantes.
Pour comprendre ce principe, voici un exemple. Si l'attraction gravitationnelle avait été plus faible, le processus d'agglomération de la matière constituant les étoiles aurait pu ne pas se produire et l'univers serait resté un grand nuage d'hydrogène. Si elle avait été plus forte, les réactions nucléaires auraient pu s'emballer, ne produisant que des éléments lourds comme l'uranium. La chimie du carbone, indispensable à la vie, n'aurait pas été possible.
Il existe deux interprétations principales de ce principe et on peut en tirer ou non des conséquences spirituelles.
L'interprétation dite version faible stipule simplement que si nous n'étions pas là, nous ne pourrions pas observer l'univers, et qu'il est normal que nous constations qu'il est réglé pour nous puisque nous sommes là. Avec lui, j'ai l'impression de tourner en rond!!!
Le principe anthropique fort, proposé en 1973 par Brandon Carter (physicien australien né en 1942) est plus intéressant. Il postule que l'univers a été conçu avec une finalité, celle de permettre la naissance et le développement des observateurs humains. (Large number coincidences and the anthropic principle in cosmology, B. Carter, Proceedings of the Symposium, Krakow, Poland, 1973, 291)
Sources: Principe anthropique dans Wikipédia; Principe anthropique dans Techno-science; Le principe anthropique dans Astrosurf
Trinh Xuan Thuan
Photo reproduite de son site web
L'astrophysicien Trinh Xuan Thuan (né en 1948 à Hanoï au Vietnam) allie sa qualité d'astrophysicien à ses réflexions philosophiques et spirituelles nourries par son éducation bouddhiste.
Excellent vulgarisateur scientifique en langue française, il est auteur de plusieurs livres populaires, dans lesquels il partage son ravissement pour l'ordre de l'univers, dont tous les éléments sont orchestrés. Ses positions le rapprochent du principe anthropique fort (voir son ouvrage Le cosmos et le lotus, Albin Michel 2011).
Pour Trinh Xuan Thuan, la quête de Dieu et la science sont intimement mêlées. Il dit: Je frémis toujours quand je vois cette beauté, cette cohérence. C'est impossible pour moi que tout cela n'ait aucun sens (Trinh Xuan Thuan, l'homme qui remonte le temps, interview pour Le Figaro, 19/10/2011). Je pense qu’il faut parier, comme Pascal, sur l’existence d’un principe créateur […] mais c’est un postulat que la science est incapable de démontrer, qui relève de la métaphysique. (Le Monde s’est-il créé tout seul, 2008, Ed. Albin Michel)
Sources: Trinh Xuan Thuan sur wikipédia; Je crois au Dieu de Spinoza et d'Einstein, interview de Trinh Xuan Thuan pour Le Point, 22/12/2011; Trinh Xuan Thuan, l'homme qui remonte le temps, interview pour Le Figaro, 19/10/2011; site web personnel de Trinh Xuan Thuan
Pour les néodarwinistes, la conscience a émergé des réseaux de neurones de notre cerveau. Elle serait donc le produit de millions d'années de mutations aléatoires et de sélection naturelle qui ont laissé apparaitre le système nerveux, puis la pensée.
Poser cela comme hypothèse. pourquoi pas? Encore faudrait-il démontrer comment des neurones pourraient produire la pensée, et expliciter quelle est sa nature. La science neurologique a montré que les fonctions cérébrales ont des résonances localisées dans certaines parties du cerveau. Mais par quel mécanisme produiraient-elles une pensée, avec tous ses attributs: non seulement comprendre les mots, mais aussi analyser, créer et choisir avec son libre-arbitre?
Lorsque des scientifiques émettent l'idée que notre conscience, nos choix de vivre d'une manière ou d'une autre, de croire en Dieu ou pas, que tout cela n'est que le résultat d'une sélection naturelle pilotée par l'adaptation avantageuse, et qu'en réalité nous n'avons aucun libre arbitre, je me demande ce qu'ils sentent lorsqu'ils prennent des décisions et font des choix au quotidien. Est-ce un avantage sélectif?
Pour Trinh Xuan Thuan, la sélection naturelle est incapable d'expliquer la façon dont nous décryptons le monde par le mental et comment nous pouvons en extraire les subtiles lois universelles. Cela n'apporte aucun avantage sélectif au quotidien.
Dans son ouvrage Le Cosmos et le Lotus (2011), il écrit: Si la connaissance sensorielle répond bien à une nécessité biologique... il n'en va pas de même de la connaissance intellectuelle... La lutte pour la survie ne requiert pas la connaissance des lois de la propagation de la lumière, ni la compréhension de la formation de l'univers, des galaxies ou des trous noirs... Je pense que si l'homme est doué de connaissance intellectuelle et capable de déchiffrer le code cosmique, c'est parce que la conscience n'est pas un heureux hasard de l'évolution cosmique. Elle a été "programmée" dans l'univers, tout comme celui-ci a été réglé de façon extrêmement précise, dès sa naissance, pour l'apparition de la vie... L'apparition de la conscience n'est pas un simple accident de parcours dans la grande fresque cosmique, elle est le reflet d'une profonde connexion entre l'homme et le monde.
Trinh Xuan Thuan explique l'ajustement fin de l'Univers.
Interviewé par Sciences et Avenir sur Dailymotion, mars 2015, 13 min
Quittant l'espace astronomique, descendons au plus profond des cellules biologiques. C'est la précision, la complexité et l'abondance des mécanismes moléculaires qui ont fasciné le biochimiste Michael Behe (présenté dans la partie 2).
Il a été conduit à penser que de tels systèmes biologiques sont conçus intentionnellement selon des plans de construction, de la même façon qu'une maison est construite en fonction d'un plan conçu par un architecte. Dans ses recherches, il met en lumière ces plans intentionnels.
En tant que scientifique, il ne s'aventure pas sur le terrain du surnaturel ou du religieux. Il part des faits de la nature, progresse par déductions logiques, avec expériences, tests et conclusion, et exprime sa conviction de l'existence d'un guide de construction.
Il juge qu'il est impossible de rendre compte de la complexité irréductible (présentée en partie 2) par de petites modifications successives d'un système précurseur, car tout précurseur d'un système de complexité irréductible auquel il manque un élément est par définition non fonctionnel. Il énonce qu'une intelligence supérieure est impliquée dans l'assemblage d'un système biologique irréductible comme le flagelle bactérien. Il n'est pas en mesure d'en décrire le processus.
De nombreux scientifiques ont été intrigués par ces investigations exposées dans son livre (La boite noire de Darwin, M. Behe). Certains d'entre eux, issus de plusieurs disciplines, ont lancé un courant de recherche nommé Intelligent Design, soit Conception intelligente (ou dessein intelligent), c'est-à-dire une conception qui se situe au-delà des lois naturelles connues.
Ce courant accumule les observations soutenant ses propositions. Plus la biologie avance en découvertes, plus elle révèle l'ingéniosité du plan d'organisation des organismes, de leurs systèmes de survie, de croissance, de protection, de réparation, et cela à toutes les échelles, de la molécule à l'organisme.
Dans sa toute dernière étude Darwin Devolves, The New Science About DNA That Challenges Evolution (2019, HarperOne), Behe montre, en tenant compte des avancées de la science génétique les plus récentes, que la grande majorité des mutations qui ont défini l'histoire de la vie sur la Terre ne sont pas dues au hasard, mais en vertu d'une finalité: l'évolution de la vie.
Sources: Evidence for Intelligent Design from Biochemistry, M.J. Behe, 1996, From a speech delivered at Discovery Institute's God & Culture Conference;Reply to My Critics: A Response to Reviews of Darwin’s Black Box: The Biochemical Challenge to Evolution, M. Behe, Biology and Philosophy, 2001, 16, 685; Peer-Reviewed Articles Supporting Intelligent Design, Discovery Institute Center for Science and Culture; National Geographic Ignores the Flaws In Darwin's Theory, Jonathan Wells, Discovery Institute, 2004, Nov 8
Un religieux a foi en l'existence d'un Dieu associé à une finalité de la vie, pour un chrétien par exemple la rédemption (autrement dit la restauration de la pleine lumière de son âme). Comment peut-il alors conjuguer sa foi de façon harmonieuse avec les connaissances scientifiques incluant l'aveuglement de la nature et l'inexistence de forces surnaturelles qui nous sont enseignées?
Jacques Arnould, Dr en Histoire des sciences et Dr en théologie.
Photo reproduite de son site web
L'historien des sciences Jacques Arnould (français né en 1961), chargé de mission au CNES (Centre National d’Études Spatiales) pour les questions éthiques, nous fournit un excellent exemple.
Ayant été dominicain pendant une bonne partie de sa vie, il a eu l'occasion d'allier sa connaissance de la science à celle de la théologie. Il a écrit plusieurs ouvrages dans lesquels il pose la question du rapport entre la foi chrétienne et la théorie de l'évolution de Darwin. (Par exemple: La théologie après Darwin: éléments pour une théologie de la création dans une perspective évolutionniste, 1998; Dieu versus Darwin: les créationnistes vont-ils triompher de la science?, 2007; Requiem pour Darwin, 2007).
Interviewé par le journal La Croix en 2006, il affirme que la position de la Conception Intelligente, éloignée du créationnisme, est intéressante. En fait cette position était déjà celle d'un certain courant religieux qui s'appelait théologie naturelle, c'est-à-dire une théologie basée sur l'observation de la nature.
Or notre connaissance de la nature a tellement changé que la théologie naturelle a aussi changé dans sa manière de dire et cela a des conséquences sur la façon dont nous regardons le monde et de se situer comme croyant. Nous pouvons trouver [...] de quoi réfléchir et travailler.. Même si cette théologie me semble un peu faible.
En 2007, dans le journal Le Monde: À en croire Jacques Arnould, l'opposition entre le fanatisme religieux et un scientisme tout aussi dogmatique, prétendant détenir lui aussi la vérité sur le sens de l'humanité, constitue un danger potentiel à l'heure où "les sociétés occidentales ne se contentent plus de la séparation, héritée de l'époque moderne, entre le "pourquoi ?", réservé à la religion, et le "comment ?", réservé à la science".
Sources: Jacques Arnould dans Wikipedia; Darwinisme ou créationnisme? La Croix, janvier 2006; Dieu versus Darwin: les créationnistes vont-ils triompher de la science ? de Jacques Arnould, Le Monde, janvier 2007
La réponse de Jacques Arnould reste évasive. Certes, comme Trinh Xuan Thuan, il réintroduit une vision du monde qui, tout en admettant la démarche scientifique contemporaine et ses résultats basés sur des analyses matérielles, inclue leur foi envers un principe organisateur (Dieu).
Pour cela, ils sont amenés à faire la distinction entre le domaine de la science qui apporte la connaissance scientifique et le domaine de la foi qui est d'ordre subjectif. Pour eux, les deux domaines sont séparés et juxtaposés. La plupart des philosophes des sciences ont la même opinion.
Mais comment est-il possible d'établir une séparation en soi en démarquant deux parties distinctes, d'un côté le domaine de la religion et de l'autre celui de la science? Il est nécessaire que l'être soit unifié dans un seul élan de Vie. Dans le cas contraire, cela crée une fissure, voire une déchirure intérieure. J'y reviendrai dans la partie 4.
Toutefois, il faut reconnaitre que dans le contexte social actuel, c'est une position courageuse au sein d'un monde scientifique qui exclue tout principe divin et toute finalité. Avec la reconnaissance du divin, l'histoire des sciences semble se rejouer à l'envers.
Rupert Sheldrake.
Photo reproduite de son site web
Dans son excellent livre Réenchanter la science (Albin Michel, 2013), le biologiste et historien des sciences anglais Rupert Sheldrake (né en 1942), surtout connu pour avoir formulé en 1981 son hypothèse des champs morphogénétiques (voir dans la partie 4), raconte que jusqu'au 17e siècle, les universitaires et les théologiens enseignaient que l'univers était vivant, animé par l'Esprit de Dieu, le souffle divin de la vie. Les plantes, les animaux, les humains possédaient une âme. Les étoiles, les planètes et la Terre étaient des êtres vivants, guidés par des intelligences angéliques.
Puis apparait la science mécaniste, qui expulse les âmes de la description de la nature. Citons encore le livre de Sheldrake (je pourrais citer de nombreux paragraphes de ce magnifique livre): la matière était sans but et sans conscience.
Toutefois, il existe un domaine parallèle d'existence qui échappe à ces lois pour l'esprit humain. Dans l'univers physique tout entier, la seule entité non mécanique était l'esprit humain, immatériel, appartenant à une sphère spirituelle incluant les anges et Dieu. C'était la position du philosophe et savant français René Descartes (1596 - 1650).
Apparait alors une difficulté importante, source de tensions et de conflits, qui occupe encore actuellement les esprits des croyants: comment concilier les enseignements religieux de l'Église et la science des académies? Simplement en se partageant le terrain. La science et la Chrétienté ont progressivement disposé de domaines réservés distincts, établis par consentement mutuel. La pratique d'une science était peu ou prou libre de toute interférence religieuse, et la religion peu ou prou épargnée d'un conflit avec la science. (Sheldrake, livre cité)
Le compromis n'a duré qu'un temps. La science est devenue plus impérieuse. À partir de la Révolution française, les matérialistes militants ont rejeté le principe des domaines séparés, l'accusant de malhonnêteté intellectuelle ou le voyant comme un refuge pour les esprits faibles. Ils ne reconnaissent qu'une réalité: le monde physique. Le monde spirituel n'existait pas... Il n'y avait qu'un seul magistère: celui de la science. (Sheldrake, livre cité)
La science évoluant, se développent d'autres branches comme la physique quantique et la science du chaos et des systèmes complexes, qui introduisent les probabilités dans le fonctionnement des machines. Elles ne sont plus déterminées avec précision. Tout est mû par le hasard, des atomes aux galaxies.
Ce système est celui qui prévaut actuellement dans l'enseignement public. C'est celui que développent les darwinistes et tous les scientifiques payés par les États. C'est le hasard qui intervient dans les désintégrations radioactives et les mutations génétiques. L'existence d'un Soi non mécanique n'y est pas envisageable. En conséquence, toutes les conclusions qui en découlent semblent les seules possibles et sont acceptées comme des faits objectifs établis, alors que ce ne sont que des opinions.
Avec le principe du hasard, les scientifiques se donnent l'illusion d'avoir exclu le déterminisme et le divin. Or il est remarquable que le hasard joue le rôle d'une cause extérieure dont on ignore la nature et le mode d'action, une sorte de déité. C'est une force aveugle qui ne laisse pas de place au libre-arbitre de l'être humain.
Le résultat est que selon la science, l'univers, la nature et la vie n'ont ni but ni sens. Ce ne sont que des machines qui tournent pour rien.Pourtant dans la réalité de leur quotidien, les gens n'en continuent pas moins à se fixer des buts. Et les animaux et les plantes adoptent des comportements qui sont manifestement intentionnels.
Dans le cadre de la mécanique probabiliste, l'activité cérébrale est considérée uniquement comme le produit de processus chimiques. En 2010, le neurologue anglais Patrick Haggard affirmait: "en neurosciences, vous ne pouvez être que déterministe. Les lois physiques existent et les événements électrochimiques cérébraux leur obéissent. À conditions égales, vous ne pouvez pas agir autrement. Il n'y a aucun "Je" pouvant prétendre "je veux faire autrement". (Cité par R. Sheldrake, livre cité)
Malicieusement, Sheldrake ajoute: Haggard ne laisse pas ses croyances scientifiques interférer dans sa vie personnelle: "Je maintiens une distance entre mon activité scientifique et ma vie privée. Je continue à croire que je choisis les films que je vais voir et que ce choix n'est pas prédestiné, bien qu'il doive l'être quelque part dans mon cerveau".
Comment les chercheurs vivent-ils l'obligation d'adopter professionnellement une science mécaniste? Ont-ils la même position qu'Haggard?
Certains sont intimement convaincus du mécanisme physique de la nature et de l'inexistence de l'âme. Ils deviennent de fervents apôtres de cette vision de l'univers, et sont parfois despotiques.
Toutefois, d'après des constats similaires de Sheldrake et de Trinh Xuan Than, il semble que beaucoup affichent professionnellement leurs conceptions mécanistes et quantiques, mais font appel à Dieu en dehors.
Ainsi, le système de deux domaines séparés, l'un qui obéit à la science et l'autre subjectif refait timidement son apparition. Il est affiché ouvertement par J. Arnould et T.X. Huan, ainsi que par les scientifiques de la Conception intelligente.
Comment pourrait-il en être autrement? La reconnaissance du plan de l'âme correspond à une profonde aspiration de notre Être. Lorsqu'une force, une impulsion, une tendance puissante en nous est ignorée, réprimée, à la fois par un conditionnement éducatif et par des interdits sociaux, elle ne disparait pas pour autant. Elle cherche à émerger lorsque le moment est venu. Le retour du spirituel correspond à une soif d'authenticité et de vérité. (voir mon article L'enfant intérieur et le langage des émotions)
La réintroduction du plan de l'âme et de l'intelligence supérieure dans la description du monde contribue à une pacification de la science et de la spiritualité, et encore plus à une pacification de notre Être. C'est donc un progrès incontestable qui contribue à notre épanouissement.
Toutefois, en rester à deux domaines séparés marqués par une frontière, n'est ni satisfaisant ni convaincant. C'est une espèce de compromis, voire de compromission. Cela ressemble à une cohabitation forcée parce qu'on n'entrevoit pas d'autre solution. C'est en quelque sorte une résignation, et elle ne procure pas la sensation d'un système cohérent qui apporterait une vision puissante et inspirante et épanouissante de la vie.
Pourtant l'unité de l'être (matière - corps - âme - esprit) a été enseignée dans la plupart des traditions spirituelles. De tout temps, des écoles de mystères ont enseigné des connaissances supérieures, similaires quelles que soient les pays. Elles décrivent le monde, son fonctionnement, la place de l'être humain. C'est une vision cohérente qui associe les connaissances issues de l'investigation extérieure de la matière à des connaissances directes vécues par les personnes en état modifié de la conscience.
En dépit du timide retour du divin dans les consciences, c'est encore la science mécaniste qui s'impose dans tous les enseignements publics et dans les médias, où le darwinisme règne en maitre. Au fil de cet exposé, on a pu parfois se rendre compte qu'il était difficile pour un contestataire, en Amérique et en Europe, de faire connaitre ses travaux.
Un chercheur persuadé du rôle d'un principe organisateur pourra-t-il l'introduire dans une proposition de modèle scientifique? Non, car des scientifiques darwinistes s'arrogent le rôle de gardien de la doctrine et font barrage. C'est ce que nous allons découvrir.
Tout ce qui ressemble à une influence surnaturelle est immédiatement rejeté comme un intrus par la communauté scientifique. Cela découle de la règle de base de la science, posée comme définition: La science prend en compte les lois naturelles et seulement elles. Par décret arbitraire d'autorité, les influences surnaturelles n'existent pas. C'est le principe philosophique appelé naturalisme.
En acceptant leur poste professionnel, les scientifiques doivent tacitement adopter cette convention. En conséquence, ils refusent délibérément d'examiner toute hypothèse qui sort de ce cadre.
Ce qui semble aberrant dans cette attitude, c'est que cela est posé comme une profession de foi et ne correspond pas à la recherche de la réalité. En effet, toute théorie de l'évolution tente d'expliquer l'apparition de nouveaux caractères, et si des champs d'information supérieurs y jouent un rôle important, on aurait pu penser que la science devrait naturellement explorer cette voie. Or elle la refuse comme une émanation du surnaturel !!
Plus étonnant encore, même sans évoquer une force surnaturelle, il est interdit à toute théorie scientifique d'inclure une notion de finalité ou but dans les organismes vivants. Il est interdit de découvrir une quelconque intention de suivre un projet dans les manifestations de la vie. Même si elle est flagrante!
Francis Crick, le co-découvreur de la structure de la double hélice de l'ADN (voir mon article L'ADN et le code génétique) affirme en 1988: Les biologistes doivent constamment garder à l'esprit que ce qu'ils voient n'a pas été conçu intentionnellement, cela a évolué. Vous voilà avertis.
Jacques Monod a écrit: La pierre angulaire de la méthode scientifique est... le refus systématique de considérer comme pouvant conduire à une connaissance "vraie" toute interprétation des phénomènes donnée en termes de causes finales, c'est-à-dire de "projet". […] Postulat pur, à jamais indémontrable, car il est évidemment impossible d'imaginer une expérience qui pourrait prouver la non-existence d'un projet, d'un but poursuivi, où que ce soit dans la nature. Mais le postulat d'objectivité est consubstantiel à la science. (Dans Le hasard et la nécessité, 1970, cité par Wikipédia)
Monod nous livre une clé de sa pensée: refuser d'introduire une intention est pour lui garant d'une objectivité. C'est faux car bien au contraire, c'est une position arbitraire donc subjective.
En réponse à cette position impérative, David Buckna pose la question: Si les choses vivantes donnent l'impression d'avoir été conçues intentionnellement, si la manifestation empirique suggère un but, alors comment les évolutionnistes savent-ils qu'elles n'ont pas été conçues? Comment savoir que ce n'est qu'apparence? (Evolution: The Creation Myth of Our Culture, 2019)
L'intention est tellement intégrée à la nature de l'univers et des êtres vivants que les néodarwinistes n'ont pas réussi à l'éliminer en eux. R. Sheldrake relève que bien que la biologie mécaniste se soit efforcée d'expulser le principe vital organisateur des organismes et ses finalités, elle les réinventent déguisées dans les molécules. Une forme de ce vitalisme implicite consiste à traiter les gènes comme s'ils étaient des entités douées de volontés, de buts et de pouvoirs.
Il écrit: La biologie mécaniste s'est développée en s'opposant au vitalisme. Selon sa propre définition d'elle-même, elle se fonde sur la négation de principes intentionnels d'ordre spirituel organisateurs du vivant, tout en les réinventant sous forme de programmes génétiques et de gènes égoïstes (ouvrage cité). Dans leur terminologie courante, les généticiens emploient abondamment les termes programmes, informations, messages, etc. L'expression "programme génétique" sous-entend que les plantes et les animaux sont organisés par des principes de finalité qui sont comme des intelligences, ou conçus par des intelligences.
Un documentaire qui démontre que l'existence d'une intelligence supérieure est mille fois plus crédible que la grande loterie universelle promulguée par les scientifiques.
L'interdiction de prendre en compte certaines influences a des conséquences graves. C'est voiler la vérité. L'excuse qu'avancent les darwinistes est que l'hypothèse d'un principe organisateur ne peut pas être vérifiée car elle est introduite comme une vérité révélée. C'est entièrement faux.
Ainsi le National Center for Science Education des États-Unis proclame: Choisissez-vous que ce soit la révélation ou l'empirisme qui détermine où envoyer la mission Apollo? La science ni ne dénie, ni ne s'oppose au surnaturel, mais elle ignore le surnaturel pour des raisons méthodologiques. L'histoire de la science a montré que le progrès vient de l'étude logique et empirique plutôt que par référence à la révélation ou à des états psychologiques internes. (Extrait de Darwin Prosecuted: Review of Johnson's Darwin on Trial, Creation Evolution Journal, 1993, 13, 36)
Ce qui est faux dans cette déclaration est que l'étude du surnaturel n'est pas de l'ordre de la révélation, mais bien d'une exploration méthodique. Lui coller cette opinion n'est qu'un prétexte pour l'ignorer. Des millions de personnes font l'expérience de forces surnaturelles et sont mis en présence des plans supérieurs de réalité.
Certains chercheurs indépendants hors normes (parfois employés par les services militaires des gouvernements qui reconnaissent en secret la valeur de leurs recherches et les utilisent pour élaborer des armes) ont effectué et effectuent des recherches dans ce domaine depuis des dizaines d'années.
Si l'expérience montre qu'il existe une force supérieure comme principe organisateur, l'ignorer est un parti-pris qui s'oppose à la recherche de la vérité sur les réalités de notre monde. C'est rejeter des solutions qui pourraient nous éclairer, peut-être même donner un sens plus profond à la vie.
Voir aussi: Scientists Urge Censorship of Terms Implying Design and Purpose when Describing Life, Dr. Jerry Bergman, May 4, 2011
Cet état d'esprit a conduit à censurer les travaux et les écrits de nombreux chercheurs et vulgarisateurs.
Le journaliste britannique Richard Milton déjà cité en a subi les conséquences après la publication de son livre The Facts of Life: Shattering the Myths of Darwinism paru en 1992. Sous la pression de darwinistes très influents, son article, au départ commandé par le Times Higher Education Supplement pour paraitre en mars 1995, a été censuré et n'a pas pu paraitre, car il remettait en cause les fondations de la théorie de l'évolution.
Lorsque le biologiste Rupert Sheldrake déjà mentionné publia en 1983 son livre A new science of life, la réaction malveillante de la science officielle ne s'est pas fait attendre. Dans l'éditorial de la revue internationale réputée Nature, l'éditeur appelle à brûler le livre.
La grogne ne s'est pas calmée avec les années. Plus récemment, il a subi de nouvelles censures. Après la publication en 2012 de son livre en anglais Réenchanter la science sur les 10 dogmes de la science, il a présenté en janvier 2013 une causerie de 15 min dans le cadre des séminaires TEDx, sur le thème Les illusions de la science. Cette causerie a été enregistrée et diffusée sur la chaine YouTube.
Suite à une manœuvre de matérialistes américains influents, TED a décidé de bannir cette vidéo et de la supprimer de la chaine. Cela a entrainé de nombreuses protestations. Heureusement, elle a été rechargée sur une autre chaine (ici avec sous-titre en français).
Anne Dambricourt-Malassé
Extrait de son site web
Voici un cas français dramatique, où une proposition scientifique issue d'une recherche minutieuse méthodique a été rejetée parce qu'elle laisse entendre l'existence d'une finalité.
Paléoanthropologue au CNRS, attachée au Muséum national d'Histoire naturelle à Paris, Anne Dambricourt-Malassé (ADM - née en 1959) a mené une recherche approfondie sur les liens entre d'une part le redressement de l'encéphale (cerveau, cervelet et tronc cérébral) à partir de l'embryon, depuis les primates fossiles jusqu'aux primates actuels et aux jeunes enfants humains, et d'autre part l'apparition de la bipédie (position debout sur deux pieds) qui a commencé avec l'Australopithèque. Elle s'est appuyée pour cela sur des connaissances d'orthopédie dento-faciale. (voir Les origines de la verticalité).
Elle en a conclu que l'encéphale se redresse par une dynamique interne, et cela provoque l'équilibre de la station debout. La bipédie n'est donc pas arrivée par hasard, mais par les lois des systèmes dynamiques d'auto-organisation. Cela ressemble aux propositions de la synthèse évolutive étendue exposée dans la partie 2.
Mais cela n'est pas en accord avec la théorie synthétique de l'évolution, selon laquelle ce sont des erreurs de copie aléatoires de l'ADN qui sont à l'origine de la bipédie. Pour les tenants du darwinisme, repérer une dynamique interne revient à introduire l'idée d'une finalité. C'est sacrilège et ce n'est pas du gout de la majorité des anthropologues.
Il est normal que la science soit l'objet de débat entre différents arguments. Ce qui est anormal et pourtant fréquent, c'est que le désaccord prenne une forme d'animosité et parfois de complot.
Le 29 octobre 2005, fut diffusé sur Arte le documentaire Homo sapiens, une nouvelle histoire de l'homme réalisé par Thomas Johnson, qui exposait les travaux scientifiques d'A. Dambricourt-Malassé.
Avertis à l'avance de cette programmation, des scientifiques reconnus ont lancé une campagne de dénigrement et de consignes à tout un réseau de relations afin que l'émission ne soit pas programmée, alors qu'ils n'avaient même pas visionné le documentaire. ARTE a pourtant maintenu la programmation, mais a accepté de présenter le lendemain une tribune, enregistrée la veille. Ni le producteur du film, ni l’auteur, ni les scientifiques qui apparaissent dans le film n'avaient été prévenus.
En réalité, la tribune n'était pas un débat, mais une mise en accusation. La cause: ADM avait "l'audace" de montrer les similitudes de ses conclusions avec celles de Pierre Teilhard de Chardin, paléontologue français réputé, mais également prêtre jésuite et philosophe (1881 - 1955).
Aussi fut-elle accusée de vouloir faire passer une vision spiritualiste et finaliste camouflée, de vouloir démontrer l'existence d'une puissance divine, de faire de la théologie déguisée en science. Pour la majorité de la communauté scientifique, c'est comme faire entrer le diable dans la maison.
Ces accusations ignobles ont été largement reprises dans la presse (Le Monde, Libération, Science et Vie, Pour la Science...) qui a donné presque exclusivement la parole aux accusateurs.
Du coup, ARTE, qui a coproduit le film, le mit au rebut. Un véritable autodafé télévisuel, dit son réalisateur. L'histoire ne s'arrête pas là. Les détails sont exposés dans le site d'ADM.Cette excitation incroyable a été déclenchée parce qu'une chercheuse consciencieuse et reconnue a exprimé honnêtement les conclusions de ses recherches !!! C'est tout bonnement ahurissant.
Ce qui est consternant dans ce conflit virulent est:
Qu'est-ce donc qui pousse un chercheur à entrer dans une rage au point de vouloir anéantir quelqu'un qui ne va pas dans son sens? Sans doute faudrait-il explorer son besoin de reconnaissance et de gloire?
Sources:< Anne Dambricourt-Malassé sur Wikipédia; site web d'Anne Dambricourt-Malassé sur sa recherche au CNRS; Présentation d'ADM sur le site du Muséum national d’Histoire naturelle;
Nouveau regard sur l'origine de l'Homme, Cinq macroévolutions qui ne doivent sans doute rien aux modifications du climat, A. Dambricourt-Malassé, La Recherche, 1996, 286, 46;
Homo Sapiens - Une nouvelle histoire de l'homme, Un os dans les théories de l'évolution, le sphénoïde ! documentaire diffusé sur Arte, sur le site web Hominidés; Un
film au pilon, Réponse à la mise en accusation du film documentaire Homo Sapiens, une nouvelle histoire de l'homme, Thomas Johnson réalisateur, sur le site web Hominidés
Lorsque des partisans de théories évolutionnistes alternatives s'appuient sur des arguments étayés, on pourrait s'attendre à une discussion entre partisans et opposants afin d'estimer quels sont les arguments convaincants. Cela se passe effectivement tant que la discussion est cantonnée à l'intérieur du cadre limité de la théorie officielle du néodarwinisme. Mais dès lors qu'il s'agit d'envisager de discuter avec les partisans de théories alternatives, on peut s'attendre à des attitudes indignes de chercheurs cultivés.
Après la publication de son livre The Facts of Life: Shattering the Myths of Darwinism en 1992, le journaliste britannique Richard Milton déjà cité en a fait la dure expérience. Il ne s'attendait pas à recevoir des louanges, mais il s'imaginait que le terrain de la controverse porterait sur des arguments scientifiques rationnels, et qu'on lui demanderait d'apporter davantage de preuves et de faits pour conforter ses énoncés.
Ce n'est pas ce qui s'est passé. Son livre a été massivement rejeté. Les critiques l'ont injurié et dénigré. Le professeur Dawkins en particulier, théoricien de l'évolution et vulgarisateur renommé, fit une réplique cinglante et humiliante dans la presse (New Statesman, London, 28th August 1992), qu'on n'aurait pas cru possible de la part d'un scientifique honoré, responsable de l'éducation de centaines d'étudiants.
Dawkins s'indigne d'abord qu'un éditeur soit assez idiot pour accepter de publier un tel livre. Ensuite, il décrit le livre comme des fadaises qui révèlent, à presque toutes les pages, une ignorance totale et complète du sujet. Dans l'édition de 1997, Milton ajoute dans sa préface: Selon la critique du darwiniste Richard Dawkins, le livre est "débile", "stupide", "du radotage" et son auteur [...] a besoin de soins psychiatriques.
Cela montre la nature du discours. Ce sont des insultes. Pourquoi tant de violence? Pour Milton, ce langage est celui d'un fondamentaliste dont la foi a été profanée.
Les controverses scientifiques houleuses ne sont pas rares en science. J'en ai déjà rapporté plusieurs dans mes articles précédents (voir Matière et rayonnements). L'introduction d'une pensée nouvelle dérange, et malheureusement, les esprits des scientifiques sont conditionnés et limités autant que ceux des autres humains. Mais dans le cas du darwinisme, en plus de la nouveauté, on touche au domaine d'une réalité spirituelle, assimilé à la connaissance révélée. Et c'est sensible, très sensible.
Autre façon courante de discréditer les travaux anti-darwinistes: leur attribuer arbitrairement des étiquettes entachées de honte. Deux étiquettes sont souvent employées: créationnisme et pseudo-science.
Dans le milieu scientifique, traiter une étude de relent de créationnisme est associé à quelque chose d'abject et méprisable, un créationnisme caricatural. Cela évite d'avoir à en discuter la valeur scientifique. Pourtant, la plupart des créationnistes sont aussi évolutionnistes, c'est-à-dire qu'ils pensent que des espèces ont été créées à l'origine d'une façon inconnue, et qu'elles ont ensuite évolué.
Le terme pseudo-science se veut exprimer la médiocrité. Wikipédia s'en fait l’apôtre. Dans l'entrée Le Dessein Intelligent, on lit dans la phrase d'introduction: Le dessein intelligent (intelligent design en anglais) est une théorie pseudo-scientifique qui prétend que "certaines observations de l'Univers et du monde du vivant sont mieux expliquées par une cause intelligente que par des processus non dirigés tels que la sélection naturelle." (mots soulignés par moi). Il est curieux qu'une encyclopédie dont le rôle est d'apporter une définition d'une expression en en expliquant la nature, introduit le sujet directement par un jugement porté contre elle.
Et plus loin: Le dessein intelligent, dans le monde scientifique, est considéré comme relevant de la pseudo-science [...]. La plupart des commentateurs et des scientifiques y voient une résurgence du créationnisme, dissimulée sous une apparence de scientificité; le biologiste britannique Richard Dawkins le désigne même comme un "créationnisme affublé d'un costume bon marché".
Dans la presse, et dans l'enseignement, les théories alternatives au darwinisme ne sont jamais présentées ni expliquées, sauf parfois pour s'en moquer comme pseudo-science, et les assimiler au créationnisme naïf du Dieu-qui-a-tout-créé.
En Europe, il est interdit de présenter la Conception Intelligente dans l'enseignement public. Aux États-Unis, une école publique de Denver s'y est risqué en 2004. Elle a décidé d'enseigner à la fois la théorie néodarwiniste et la Conception Intelligente, afin que les élèves puissent avoir connaissance des deux.
Peu après, une plainte fut déposée par l'Union américaine des libertés civiles pour interdire cet enseignement, arguant que c'était une forme de créationnisme, qui violait la Constitution des États-Unis par son caractère religieux. Les plaignants obtinrent gain de cause. (voir aussi The Truth About the Kitzmiller v. Dover Intelligent Design Case, p.9)
Cela se reproduisit en 2015, en Californie, quand un professeur de classe supérieure voulut présenter un débat sur ce sujet (voir Friendly Atheist). Il y eut aussitôt une réaction de deux associations (Freedom From Religion Foundation et Richard Dawkins Foundation for Reason and Science) pour faire cesser cette animation et supprimer tous les documents pédagogiques qui s'y référaient.
Il s'agit donc d'une forme d'inquisition qui ne laisse place qu'au seul dogme darwiniste. Il suffit de coller l'étiquette religion sur une théorie pour qu'elle devienne illégale dans le cadre de la laïcité.
À cause des censures décrites précédemment, il n'est pas étonnant que la population ne connaisse (superficiellement) de l'évolution que la théorie néodarwiniste. C'est la seule qui est enseignée, et c'est aussi la seule qui est présentée dans les encyclopédies, dans la presse et dans les musées.
De plus, nous sommes conditionnés à penser que la théorie néo-darwiniste est prouvée, indiscutable et la seule existante pour rendre compte des découvertes fossiles.
Ainsi l'entrée de Wikipédia sur la théorie synthétique de l'évolution dit explicitement (à la date de publication de cet article, 2019): La théorie synthétique de l'évolution est la théorie de l'évolution présentement acceptée par la communauté scientifique. Nous voilà bien cadrés, sans mention de divergences.
Dans l'excellente revue National Geographic (novembre 2004), on trouve un article intitulé Darwin était-il dans l'erreur? Les preuves manifestées [de la valeur du darwinisme] sont abondantes, variées, sans cesse plus nombreuses, solidement interconnectées, et aisément visibles dans les musées, les livres populaires, les manuels, et une gigantesque accumulation d'études scientifiques avec comité de lecture. L'auteur écarte d'emblée les opposants car la majorité des gens qui rejettent la théorie de l'évolution le font par ignorance. Ils n'auraient pas étudié la biologie et l'évolution.
Comment le lecteur peut-il se douter que c'est là une distorsion de la vérité? Et que théorie et faits sont volontairement confondus?
De même, dans le milieu archéologique, lorsqu'un chercheur fait une découverte, il se doit de la replacer immédiatement dans le cadre de cette théorie.
Le principe de sélection naturelle est infusé culturellement et s'immisce dans le langage ordinaire. Par exemple, si quelqu'un s'extasie devant une magnifique fleur, il est fréquent d'entendre le commentaire que la sélection naturelle a produit une œuvre géniale. Dans des forums de lycéens ou d'étudiants sur Internet, les commentaires spontanés d'étudiants sont édifiants par leurs jugements hâtifs et souvent cyniques ou malveillants à propos du créationnisme. Il est clair qu'ils ne font que répéter ce qu'on leur a inculqué.
En science, il est essentiel de distinguer d'une part les observations ou faits constatés, considérés comme un aspect de la réalité du monde physique, et d'autre part l'interprétation qui en est faite à l'aide d'une théorie, considérée comme une construction mentale qui éclaire les faits et leur donne un sens.
Une interprétation théorique n'a rien d'absolu et peut se révéler inadéquate si les faits ne sont pas suffisamment précis pour l'étayer, ou si un fait nouveau n'est pas en accord avec elle. Tous les philosophes sont d'accord sur ce principe.
Malheureusement, dans la pratique, lorsque la théorie semble très bien cadrer avec les faits et donne satisfaction à ses adeptes, il arrive que ceux-ci l'assimilent à un fait. C'est ce qui se passe dans le cas de la théorie synthétique de l'évolution. C'est une dérive qui obscurcit la recherche et fausse le débat.
Récapitulons. Les faits concernant l'évolution sont les suivants: La collecte de fossiles montre sans ambiguïté que les espèces ont varié d'une époque à l'autre. De plus on peut constater des homologies ou analogies dans leur morphologie (voir article Histoire des animaux). On peut donc dire que les espèces ont évolué.
Mais attention au sens qu'on donne au mot évoluer. Il ne présume pas du procédé par lequel les espèces évoluent de l'une à l'autre.
Imaginer un mécanisme (mutations génétiques aléatoires, transmission d'un caractère avantageux, sélection naturelle par la contrainte de l'environnement) est intéressant, mais cela reste seulement une hypothèse, une interprétation. Car constater qu'une évolution a eu lieu d'une espèce à une autre n'indique pas que l'une est dérivée biologiquement et génétiquement de l'autre.
Or les tenants de la théorie de l'évolution sont tellement persuadés qu'elle est la seule vérité qu'ils ont pris l'habitude de la considérer comme un fait au lieu d'un modèle explicatif.
Pour Jacques Monod, c'est la seule théorie concevable: Le hasard pur, le seul hasard, liberté absolue mais aveugle, à la racine même du prodigieux de l'évolution, cette notion centrale de la biologie moderne n'est plus aujourd'hui une hypothèse, parmi d'autres possibles ou au moins concevables. Elle est la seule concevable, comme seule compatible avec les faits d'observation et d'expérience. (Le Hasard et la Nécessité, 1970, cité par Wikipedia)
Dawkins insiste en ajoutant insidieusement un jugement moral sur les scientifiques qui ne sont pas en accord avec la théorie: Une chose sur laquelle tous les vrais scientifiques sont d'accord est le fait de l'évolution lui-même [décrite par la théorie néodarwiniste]. [...] L'évolution est autant un fait que la chaleur du soleil. Ce n'est pas une théorie, et par pitié, cessons d'apporter la confusion aux naïfs de la philosophie en l'appelant de cette façon. L'évolution est un fait. (R. Dawkins, The Illusion of Design, Natural History Magazine, Dec 2005, 114, 9, 35–37 cité par wikipédia, Evolution as fact and theory)
Le biologiste Douglas Futuyma (états-unien, né en 1942) avoue ouvertement la dérive de la signification du fait: Un fait est une hypothèse qui est confirmée par l'expérience de façon tellement avérée que nous supposons qu'elle est vraie, et faisons comme si elle était vraie (Evolutionary Biology, 1998, mots soulignés par moi). Cette dérive est totalement antiscientifique. (voir en annexe Les théories évolutionnistes répondent-elles aux critères scientifiques?)
L'Académie Nationale des Sciences des États-Unis renchérit: Les scientifiques utilisent le mot "fait" le plus souvent pour décrire une observation. Mais les scientifiques peuvent aussi utiliser ce mot dans le sens de quelque chose qui a été testé et observé tellement souvent qu'il n'y a plus de raison valable de continuer à tester et à chercher des exemples. Dans ce sens, l'évolution est un fait. Les scientifiques ne se posent plus la question si la descendance avec modification a eu lieu car sa manifestation concrète en faveur de cette idée est forte (Science and Creationism: A View from the National Academy of Sciences, 1999, mots soulignés par moi). Ici, on introduit subrepticement le mensonge, puisqu'on passe volontairement sous silence les scientifiques qui se posent des questions et suivent d'autres pistes.
En opposition, le paléontologue états-unien Stephen Gould (1941 - 2002), auteur de la théorie des équilibres ponctués et vulgarisateur talentueux de la théorie de l'évolution en biologie, a fait remarquer (La structure de la théorie de l'évolution, 2006) qu'il y a souvent confusion dans le discours entre évolution en tant qu'observation et mécanisme explicatif de cette évolution (sélection naturelle). Darwin lui-même insistait sur cette distinction.
De même le Dr William C. Robertson remet les pendules à l'heure: J'ai entendu trop de scientifiques déclarer que l'évolution est un fait, souvent pour riposter à la déclaration que c'est seulement une théorie. L'évolution n'est pas un fait. Plutôt que de déclarer cela, je pense que les scientifiques seraient plus appréciés s'ils reconnaissaient que l'évolution est une théorie, en expliquant ce qu'est une théorie. (Answers to Science Questions from the Stop Faking It! Guy, National Science Teachers Association, 2009)
Cette confusion a des conséquences néfastes, voire dramatiques. Elle donne libre cours à des attitudes inadmissibles. En effet, elle fournit un permis officiel pour présenter la théorie évolutionniste comme une vérité absolue, pour censurer toute théorie alternative en la qualifiant de pseudo-science absurde ou abjecte, et pour refuser toute discussion sur le sujet.
Assimilant hypothèse et faits, les évolutionnistes se targuent de rapporter des connaissances objectives, libres de croyances métaphysiques. C'est bien évidemment une illusion. C'est même carrément prétentieux.
Par exemple, Dawkins affirme que la foi est l'un des plus grands maux terrestres, (livre Pour en finir avec Dieu, 2006 - voir son interview par Counterbalance). N'a-t-il pas compris que ses affirmations sont basées sur des croyances? Des sociologues américaines les ont décryptées: l'ADN est immortel; il utilise le corps à son profit (Dorothy Nelkin et Susan Lindee, La mystique de l'ADN, pourquoi sommes-nous fascinés par le gène? Belin, 1998). Il s'agit de principes arbitraires et métaphysiques qui sont indémontrables, comme l'a analysé sémantiquement le biologiste Denis Noble (présenté dans la partie 2).
En réalité, tout système de pensée, toute proposition, ont pour base des présupposés.
Faire du hasard l'acteur de l'évolution et exclure la possibilité d'une finalité sont des postulats métaphysiques.
C'est aussi l'analyse que développe Phillip E. Johnson (né en 1940), un professeur de droit américain auteur de plusieurs livres, (Darwin on trial, 1991, traduction: Le Darwinisme en question. Science ou métaphysique? ed. Exergue, 1997). Par une logique analogue à celle du droit, il constate que ce qui propulse la communauté évolutionniste est en fait une position philosophique, une mythologie matérialiste. Dans Reason in the balance (1995), il affirme que cette philosophie a pris la place d'une véritable religion qui façonne la culture de toute notre civilisation de façon insidieuse.
Sources: Phillip E. Jonhson dans wikipedia; Creation and Evolution, An Interview with Phillip Johnson, 1998
En se persuadant que tout est régi uniquement par les lois de la matière et du hasard, sans intervention divine ni programmations supérieures, les scientifiques ont délibérément élaboré une sorte de religion nouvelle, à laquelle ils ont foi et qu'ils défendent à tout prix. C'est celle du culte matérialiste, vénérant les lois de la nature comme facteur unique d'évolution, y compris celle de la conscience.
Le hasard y tient lieu de divinité sombre et insensible. C'est lui qui détient le pouvoir. Il est considéré comme une force obscure et indéfinissable qui agit de façon imprévisible pour son propre compte.
Dès lors, les scientifiques matérialistes endossent le rôle de porteurs de la vérité, autrement dit de prêtres du matérialisme, et ils s'emploient activement à la diffuser. Ils refusent tout débat avec des contestataires. Pour eux, toute opposition est signe d'ignorance ou d’imbécillité.
Comme le souligne le sociologue et historien des sciences Bruno Latour (né en 1947, auteur du livre La science en action, 1989, cité par R. Sheldrake), les membres du groupe professionnel estiment qu'ils ont des connaissances, tandis que les autres n'ont que des croyances plus ou moins tordues.
Dans son livre Le darwinisme ou la mort d’un mythe (1997), le biologiste Rémy Chauvin écrit: le darwinisme s'apparente à une secte prônant un athéisme obtus, aux postulats scientifiques contestables.
Je cite à nouveau R. Sheldrake: Je suis convaincu que les sciences, malgré tous leurs succès, sont aujourd'hui étouffées par des croyances.
Explorons donc une voie nouvelle explicative de l'évolution: celle de guides de créations sous formes d'informations en provenance de champs environnants ou de champs des plans supérieurs (partie 4).
Champs d'information et mythes de création
4. La constitution des organismes, en particulier de la molécule d'ADN avec ses codes génétiques précis et volumineux, n'a pas pu avoir lieu sans l'apport extérieur d'instructions spécifiques. Elles sont fournies sous la forme de champs d'information ou archétypes, de nature électromagnétique, gravitationnelle, ou d'une nature plus subtile (éther, champs de torsion, entéléchie, champs morphogénétiques, champs H, champ akashique). Par ces champs, les êtres vivants sont reliés subtilement dans un vaste réseau. Depuis toujours, les mythes de création planétaires décrivent un processus semblable. D'un principe organisateur, émanent des instructions sous forme de pensées, de rêves, de géométrie ou de sons. Cette vision renouvelée donne à l'évolution des formes de vie un sens bien plus exaltant et plus responsable: accompagner l'éveil de la conscience.
***
ANNEXES
Le ressort de l'évolution est-il réellement la pression de l'environnement comme l'affirment les darwinistes? Certains scientifiques pensent qu'elle serait plutôt due à une orientation due à des forces internes des organismes.
C'était le cas du zoologiste français Pierre-Paul Grassé (1895 à Périgueux - 1985 à Carlux), membre de l'Académie des Sciences, auteur de l'ouvrage L’Évolution du vivant, matériaux pour une nouvelle théorie transformiste, (1973, Albin Michel) sous le nom d'évolution orientée.
Pour lui, l'évolution s'effectue par une dynamique interne des organismes et non par la sélection naturelle. Pour la mettre en défaut, il cite de nombreux exemples d'espèces qui ont cessé d'évoluer et sont restées quasiment identiques jusqu'à nos jours, malgré de grandes modifications géologiques et climatiques. Il pense que l'évolution est orientée vers une complexité de plus en plus grande des êtres vivants.
Sources: Orthogenèse et Pierre-Paul Grassé dans Wikipédia
Les opposants à la Conception intelligente ont trouvé un argument pour la rejeter: la réfutabilité ou testabilité.
L'argument s'appuie sur les conceptions du philosophe des sciences autrichien Karl Popper (1902 - 1994), auteur de plusieurs ouvrages dont La logique de la découverte scientifique (Payot 1973, et 1934 pour la version allemande originale). Il a cherché à déterminer ce qui permet de vérifier qu'une théorie est juste ou non.
Une théorie est une conjecture, c'est-à-dire une sorte de scénario imaginé qui pourrait expliquer une ou plusieurs observations. Par exemple, si j'observe que le sol est mouillé, je peux faire la supposition qu'il a plu. Mais ce n'est pas le seul scénario possible, car je peux aussi imaginer que quelqu'un a arrosé. Par contre si le sol est sec, je suis certain qu'il n'a pas plu.
Autrement dit, pour Popper, il est possible de dire qu'une théorie est fausse (de la réfuter) si ses prédictions ne se réalisent pas au cours des expériences, mais il est impossible de vérifier complètement qu'elle est juste.
En conséquence, une théorie recevrait le label scientifique si on peut imaginer une expérience qui serait susceptible de la mettre en défaut. Dans le cas contraire, elle a le statut de métaphysique. La théorie est d'autant plus robuste qu'elle a résisté à de nombreuses tentatives de réfutation. Malgré tout, cela ne prouve pas qu'elle est vraie.
Cette démarche permet de réfléchir sur la distinction entre les faits et leurs interprétations théoriques. Mais faire de la réfutabilité la définition d'une théorie scientifique est aberrant. C'est seulement un point de vue qui a été critiqué par d'autres philosophes des sciences, par exemple Paul Feyerabend (autrichien, 1924 - 1994) ou Alan Sokkal (né en 1955, physicien états-unien). Ces derniers montrent qu'historiquement les théories ont été acceptées parce qu'elles ont remporté des succès, non pas parce qu'on a rejeté les autres.
Faire de la réfutabilité un critère absolu pour reléguer les énoncés non réfutables (métaphysiques) dans la catégorie des pseudo-sciences sans intérêt voire méprisables est une dérive que Popper ne suggérait pas. Pour lui la métaphysique n'a rien de péjoratif, bien au contraire. La science est fille de la métaphysique. Elle avance à partir d'énoncés métaphysiques qui sont peu à peu transformés en énoncés scientifiques.
La Conception intelligente a été combattue par la National Academy of Science des États-Unis parce que - selon elle - elle n'est pas testable par les méthodes de la science, c'est-à-dire au sens de Popper, ce qui est faux.
En effet selon Behe, il suffirait de démontrer expérimentalement que la sélection naturelle peut elle-même produire des systèmes complexes pour que la théorie de la Conception Intelligente soit remise en cause. Cela n'a pas été tenté.
Voir aussi: Eight Reasons Why Intelligent Design is Science, Dennis Jones, 2015
Selon le zoologue suisse Ariel Roth (né en 1927), les événements postulés par la théorie de l'évolution ne sont pas testables sur la base d'une prédiction. Rares sont les expériences de test qui ont été proposées et elles n'ont pas été réalisées. (Does evolution qualify as a scientific principal?, Ariel Roth, Geoscience, 1977, Origin 4, 1, 4)
Texte conforme à la nouvelle orthographe française (1990)
12 juin 2019